Que peut-on attendre de l’écrivain sinon d’être lui-même ?
Tous les fantasmes du lecteur, toutes les orientations du régime ou du système politique, quels qu’ils soient, restent décalés ou fortement éloignés de l’attitude du créateur, de son honnêteté.
Certes, il peut chercher à plaire avant tout. Dans cette démarche superficielle, destinée à recueillir dans les plus brefs délais un assentiment collectif dont la valeur n’est pas le critère premier, l’écrivain est déjà tourné vers les autres. Il est loin de lui.
Au contraire, celui qui écrit à partir de lui-même et qui propose ensuite son travail est dans une démarche bien plus authentique. Il prend le risque d’avancer sur le fil du rasoir, conscient simultanément de sa singularité et de sa ressemblance avec les autres, la première caractéristique l’emportant largement sur la seconde.
La réaction du public peut être aussi diverse qu’inattendue : indifférence, mépris, rejet, ostracisme ... ou surprise, perplexité, adhésion, enthousiasme.
Objectivement, le public n’attend rien. Le créateur ou l’écrivain, au contraire, attend ce que l’on pourrait nommer une réaction. Et si possible positive. Qui fera, du moins, parler de littérature.
Tous les reproches possibles lui seront adressés, il ne doit pas s’en étonner. Pourtant, c’est en étant lui-même, c’est en étant fidèle à lui-même qu’il aura la possibilité de toucher les autres.
L’auteur, en quelque sorte, est un gladiateur des temps modernes, mais un gladiateur solitaire, sans laniste. Jeté dans l’arène - ayant peut-être rêvé de cette scène - , il doit se battre. Et attendre le verdict : le pouce baissé de l’Histoire et sa marginalisation ... ou le pouce dressé de l’Histoire et sa consécration.