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Hantise de l'air, essence de la poésie
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 Article publié le 13 juin 2008.

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On peut se demander ce qu’il reste de la poésie lorsqu’elle a perdu ses droits à l’a-priori, au système ou à la construction, quand elle ne surplombe plus l’expérience mais qu’elle en constitue le centre. Il lui reste tout. Car le système, la déduction, l’explication, la description, ne sont jamais l’essentiel de la poésie. C’est même l’inverse : elle détruit ce que les arrangements les structures antérieures exprimaient et cachaient du rapport de l’être à lui-même, aux autres, au monde. Chaque écriture antérieure n’est qu’un langage (il était précieux à ce titre) pour traduire une manière de se situer. Mais pour que la poésie perdure il faut que ce rapport demeure problème , qu’il ne soit jamais prix comme allant de soi et que le tête-à-tête subsiste entre lui et celui qui en lui tente de se parler en repoussant, transformant, quittant le langage admis pour le pousser dans l’ignorance de qui il est, de si il elle. On n’apprivoise jamais le sphinx on tente de répondre à son énigme de manière abrupte en multipliant sans cesse les énigmes qu’il propose.

On se demande aussi ce qu’il reste de la poésie quand elle perd ses " couleurs " lorsque n’en demeurent que le noir et le blanc des signes qui ne jouent plus à représentent, à décrire le monde (selon la vieille définition d’Horace). Une fois encore la réponse est : presque tout car l’image (et entre autres Beckett l’a bien montré) n’est pas le noeud de la poésie. Son système appartient aux seul langage qui se construit en avançant. On poeut même affirmer que celle-ci trouve sa puissance dans l’absence d’image bref dans sa puissance d’affaiblir les indices de réalité phénoménale en un seuil d’émergence minoré : voir en poésie ce n’est plus percevoir mais "perdre voir".

La poésie trouve sa force dans sa puissance " évidante ". Soudain, le monde apparaît à mi-distance de l’empreinte et de la coulure afin d’inventer " jour " nouveau (gît-il de nuit comme chez Celan ou Bernard Noël). Soudain l’espace poétique devient tout sauf un porte image sinon de celui des fantômes qui nous hantent ou circulent dans nos parages et afin de nois montrer combien nous ne sommes pas blancs de neige à leur égard. La poésie marque un retrait du monde mais c’est aussi une manière de réfléchir sur son lieu et son temps et sur notre " centre " sans milieu. C’est se situer dans une sorte de " critique " de soi et du monde : non pas leur meurtre mais le déplacement de leurs traces. On peut appeler cela sa hantise de l’air ou sa délocalisation. Le résultat est une inquiétante étrangeté qui nous lie à la poésie (bien plus que genre) donc à nous-même et au monde.

J-P Gavard-Peret

 

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