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Article publié le 7 mars 2021. oOo J’y chante tout l’été Pour tromper mes fringales Comme une vraie cigale Je n’ai rien de côté
Je sieste sous les frondes J’y liche ma boisson Tant pis si ma chanson S’effiloche à la ronde
Au square les nounous Débrident leurs mamelles Poète à la gamelle J’écarte leurs genoux
Sur les bancs on cabasse Tout est bon à nier Seul le vieux jardinier Sait que la terre est basse
Mon eustache est tiré J’attends la dame Abonde Les mioches se débondent Derrière les fourrés
Une clochette sonne On joue du rossignol Les uns vont à Guignol Et les autres buissonnent
Les chiens sont interdits Même tenus en laisse L’âne que rien ne blesse Vend pantins et candis
Les amoureux s’abecquent Et je suis un Peynet Sans crayon ni carnet Qu’un pigeon haussebecque
Là on fait du tricot On brode on raccommode Chacune est à sa mode Et vante son fricot
Charmantes éleveuses Cacotantes Hop là Aurai-je l’œuf au plat L’omelette baveuse
Entre les beaux nichons D’une bonne boniche Lorsqu’un oiseau s’y niche Rappliquent cent louchons
Réjouissez-vous putasses De mes mots enfantins Les plus jolis tétins Deviennent des tétasses
Comme quoi mes poteaux Rayés d’un trait de plume Nous pouvons naître enclume Et devenir marteau
Le gardien n’est pas blêche Sa gosse émie du pain Galopiots salopins Je confisque vos flèches
Mes songes automnaux Toutes vos fées sont rousses Les plus jeunes s’esbroussent Pour rouler mes tonneaux
J’écris mes chants de cygne Au pays provençal Y ai-je un commensal Un pauvre arpent de vigne
Sans faire de détail Mes nourrices me sèvrent Je mords leurs seins de Sèvres Leurs tétons frottés d’ail
Tourneuse de prunelle Au frisquet de mon soir J’ai l’œil sur tes bossoirs En tant que sentinelle
Là c’est leur banc Le camp Volant et sa duchesse Etalent leur richesse Pour la mettre à l’encan
Là-bas des ouvrières De moyenne vertu Ont le verbe pointu Et le feu au derrière
Une armée d’olifants Promise à la tuerie Dans la rouge prairie Enrôle des enfants
J’entonne la trompette Et buvotte au clairon Soudrille biberon Au nase de pompette
Tout ce qui vous détend Me crispe gens du monde Par delà la calme onde Je coule un autre temps
Je suis à la tétine D’un boulet de canon J’attends sous mon vrai nom Mon tour à la cantine
Je traîne mon barda Tout un quartier froufroute J’ai ma feuille de route Partirai-je soldat
Est-ce la République Emplâtrée de soudards Qui me tend ses pendards Ce n’est qu’une réplique
Ce sont de vrais jumeaux Blottis dans leur repaire Ces deux-là font la paire Mêmes joies mêmes maux
Et cette bonne farce Que je mange sans faim Elle arrive à ses fins Cette charmante garce
Je réchauffe les os De ma vieille carcasse Mes gestes qui se cassent Apeurent les oiseaux
Comme un croque-mitaine Cadavéreux gris-vert Engoncé dans l’hiver J’ai ma turlututaine
Un ras bord Madelon Je m’en reviens de guerre Quand le cœur ne va guère Les yeux en disent long
Ô ma muse sans dote Allaite à tes nibards Ton souffreteux bibard Amasseur d’anecdotes
Que de monde au balcon Je dévoile des bustes Des derrières robustes Et des ventres féconds
Négresse tétonnière Dans tes fouillis à fleurs Je reprends les couleurs D’une vie casanière
Ce n’est pas en léchant Les murs que je m’engraisse Mais aux pis que je presse Aux bons bouts alléchants
Grenades mandarines Pommes poires melons Je gerce un mamelon Des lèvres purpurines
Ô mes neuf sœurs-obus Qui rassemblez mes pistes Je ne suis qu’un lampiste Qui parle par rébus
Je reviens au jardin De ma petite enfance Plein de coups et d’offenses Poing féminin godin
Dans la claire fontaine Les baigneuses d’airain Sonnant chaudes de reins M’ont sacré capitaine
Où sont tous mes châteaux Tous mes remparts de sable D’architecte inlassable Sans pelle ni râteau
Dadas escarpolettes Casse-culs tobbogans Des troupes de brigands Et des reines Gillette
Soudain c’est le printemps Les filles sont légères Les grasses ménagères Retrouvent leurs vingt ans
Les massifs s’épaississent On pousse le landau Le long des miroirs d’eau S’étiolent des Narcis
Robert VITTON, 2016 La dame Abonde : la principale des fées bienfaisantes. Rossignol : chalumeau que les enfants fabriquent avec un bout de branche. Dot : comme Regnard (Je fais arrêt sur vous, sur la fille et la dote.), j’emploie dote au lieu de dot, lui pour rimer avec il radote, moi pour rimer avec anecdote. La reine Gillette : grisette qui fait la grande dame.
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