Après la poésie municipaliste aux accents militants et volontiers polémiques, pourquoi pas un petit détour par l’Université ? Répliques telluriques secouant les données théâtrales de ce monde, ce petit bouquin n’en manque pas. Il est vrai qu’il est d’un poète d’expérience, voire de reconnaissance. On s’y amuse, puisqu’il s’agit de « notes sur le risible », du burlesque quotidien au spectacle de la connerie ambiante. Contrairement à ce qu’affirmait William Faulkner, les vrais poètes sont d’abord de sacrés romanciers (j’interprète), même s’il ne leur arrive pas toujours d’écrire des romans. Il est vrai que l’œuvre de Jean-Pierre Bobillot en impose : d’ailleurs il songe à la sieste qui, à son âge forcément canonique, s’annonce de longue durée, lit de la pensée que ne connaît sans doute pas plus jeune que lui. Mais enfin, voici un livre qui peut être lu par tous les âges, comme Tintin. Et ce, malgré un avertissement qui s’en prend nettement à celui ou celle qui n’a pas acquis les bases de cette connaissance particulière qu’est la poésie. L’ayant lu d’un bout à l’autre, je n’y ai pas trouvé de composition linéaire, mais sans doute est-il nécessaire de s’y connaître non seulement en poésie générale, mais aussi en cheminement bobillotien. Pourtant, le plaisir est à chaque page, simple et efficace. N’importe quel imbécile s’y retrouvera au moins un peu. Telle est la part du risible qu’on confond souvent avec le visible. Car je crois que c’est là ce qui s’y passe : choses vues et passées à la moulinette d’une pratique franchement amusée de la langue et de ses prétentions à la morale et à l’esthétique. On est amené à en savoir plus sur ce que cela donne sur la scène bruyante et colorée d’un théâtre poussé dans les cordes d’un cinéma enfin libéré de ses drames convenus d’avance, avant même d’y entrer et d’y poser ses saintes fesses. Ce texte somme toute original pourrait servir de propre à tous ceux qui cultivent encore l’espoir de n’être pas tout à fait bêtes de pratiquer et/ou d’aimer la poésie. À acquérir sans plus attendre pour la modique somme de 14 euros (80 pages) chez Tinbad, sous le signe d’Ulysses.
Patrick Cintas.