Trop longtemps, je me serai abaissé à baiser la main qui me nourrissait.
Un jour, j’ai mordu la main. Vorace, je l’ai arrachée. Je me suis enfui avec la palpitante coincée dans ma gueule immonde et je l’ai dévorée tout à mon aise dans un coin tranquille où je savais pouvoir être tranquille.
Qu’on me pardonne cette répétition qui me donne du bonheur.
Délicieux repas en effet qui acheva de faire de moi un loup solitaire.
Finies les caresses, finie la pâtée. Le toutou à sa mémé est devenu un loup sanguinaire.
Voici venu le temps de l’errance.
Chasser en meute, c’est mon rêve désormais.
Je ne désespère pas de rallier une meute un jour prochain. Ce n’est qu’une question de temps. J’en serai le maître incontesté, l’alpha et l’oméga.
Entre temps, je cours les bois, me nourrissant de baies sauvages et de petits rongeurs. Il n’y a pas de sot repas. Tout est bon à qui sait rendre à la forêt les biens qu’elle dispense.
J’ai les dents longues, le verbe acéré et tout le temps devant moi.
Parole de loup.
Explique qui pourra.
Jean-Michel Guyot
5 mars 2014