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Théâtre de Patrick Cintas
Ode
[E-mail] Article publié le 9 janvier 2006. oOo
Scène VIIIFausto, prêcheurs
PRÊCHEURS
XXVII
O la douleur t’égare-t-elle Á ce point, mon frère, que tu Oublies jusques à l’éternelle Raison, et par quelle vertu La nuit peut-elle tant de charme ?
FAUSTO
Écartez-vous, prêcheurs de larmes ! Allez plutôt sonder les murs Pour voir si j’y suis. Que vos crosses Battent la mesure à mes noces. J’épouse l’air, faute d’azur.
Il se jette dans le vide.
XXVIII
Azurs... o goutte de rosée ! L’amour, est-ce un goût de nectar Où j’ai butiné la pensée Ce matin, vivace, à l’instar D’une abeille ? et l’épousée rit Ayant ouvert la jalousie. Une reine éclot sur ta peau D’une autre faim, et matinale Sort, ma compagne bucéphale, Ma vie, tandis qu’on ferme un beau
XXIX
Tombeau, angle de pierre allée À la rencontre d’une sœur Arrachée par la mort ailée Sur son balai, l’ivre liqueur Sublimant dans son jeune ventre Aux fiançailles avec le chantre Exilé par les goupillons. Et j’ai pétri le peu de terre Qui te couvre, en un cimetière Mais un jardin de roupillons.
XXX
Puis le soleil déjà décline, En gargouille immonde se fond, Vivant la pierre, et la patine Au vol éternel d’un pigeon Qui se nourrit de ta grimace. Ce sont des morts qui te font face. À l’entour le sang est une encre. Tu n’es pas seule et je maudis Ces signes plus où tu pourris, Ces pages blanches où je m’ancre.
XXXI
Las, je me tais, et même un chancre Que je destine au paradis, Pitre céleste, incube cancre, Puisant des stigmates ravis Aux vaines ruines festivales, Assoiffé des saveurs rectales De ma fille, j’écris toujours Borgne, une fois fermée la grille Et, à travers l’ivre lentille, Je lorgne les nuits et les jours.
XXXII
Il faut alors que je blasonne, Sinon je rêve, et je m’en vais Au diable, après midi le faune Ayant bu ou non les mauvais Vins de ton infernale algèbre, L’herbe, le sang et les ténèbres Dans le chaudron, le feu igné Entre quatre pierres sacrées Et le cul des vierges damnées. Je tiens la pierre et je suis né !
Il s’immobilise dans sa flaque se sang.
PRÊCHEURS
XXXIII
Quoiqu’il ne mente, à dire vrai Que peu, s’il grave l’épitaphe D’une morte et cornu se plaît À mordre un bouchon de carafe, Le miroir savant s’est brisé En mille morsures figé, Et le grimoire ensorcelé À l’heure où le hibou s’esclaffe Avec son compagnon, o gaffe ! Page après page dispersé.
XXXIV
Et au ciel de vagues signaux Dans des chevelures de lune Multipliant le chiffre faux Par les griffes des infortunes. Et des cloaques triomphaux Célèbrent ses chants saturnaux Et l’obscurité de ses runes Qui ne signifie rien, suppôts Analphabètes. Des aulx Secoués n’en chassent aucune.
Fausto relève une tête d’angoisse.
FAUSTO
XXXV
Prêcheurs, allez vous faire foutre ! Je me meurs, ils font des sermons ! Voilà l’épitaphe d’une outre Pleine de vin, o moribond Que je suis ! Quels mots me destines Tu, toi, excepté les mâtines ? Car ce que j’ai tant attendu, Tant arrosé - Dieu me pardonne - Commence de paraître. On sonne La relève. Voici mon dû.
Entre Touma Folle, mi-sergent, mi-évêque.
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