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Voir aussi la [Galerie de peintures] de Jacques Cauda [E-mail] Article publié le 30 juin 2024.oOo À Sabine Moret
Il est un film pour qui je donnerais tout Hitchcock, tout Godard et tout Renoir. Oui, cher Nerval, mais lequel ? Quel film ? Je ne sais pas. Pas encore. Ça va venir au fil de l’écrire comme la semence au fil de l’amour. Cinéma & fantaisie ? Pourquoi non ! Le poème de Gérard, certes. Mais le film ? Fantasia chez les ploucs ? Vous vous souvenez ? « Sagamore Noonan vit reclus dans une ferme de l’Alabama où il distille de la gnôle clandestinement. Il reçoit la visite de son frère Doc Noonan et de son fils Billy. Une jeune strip-teaseuse, dont le bikini contient sa parure de diamants, et son compagnon gangster viennent troubler leur tranquillité. » Un film de Gérard Pirès avec Jean Yann, Mireille Darc et Lino Ventura. Ah Lino acteur en fantaisie. En voici en voulez-vous ? Il se jeta sur lit, virant son dur au mou cétacé. Il passa ses deux mains sous sa nuque dans le confort de ses cheveux et ferma les yeux. Il y vit un paysage de collines où des armées de squelettes, à l’aide de cercueils dressés devant eux comme des boucliers, poussent un troupeau d’humains affolés. Parmi la foule apeurée, un guignol se détache, lui, que les squelettes obligent à rentrer dans une boîte minuscule ! Quand il ouvrit les yeux, il savait qui avait ligoté nue sa Mireille, il savait que la boîte figurait la prison à laquelle il avait échappé. Mais pas eux. Les gus avec qui il avait braqué une banque, des lustres auparavant. Tout le monde s’était fait serrer sauf lui, prince des égarements ; il avait gardé le pognon. À leur sortie de zonzon, ces cons usés comme des dents cariées étaient venus le trouver pour négocier, lui rappeler ses torts, jouer aux vengeurs en mal du fric qu’il leur devait… « Dehors les scories, out les zéros ! Ou je vous explose, je vous boum ! » Il était dans son film, héros toujours, engrossé par lui pour lui ! Pour coller à son personnage, il disait s’appeler Lino comme Ventura, doux démon, armoire à glace avec pic, poutre et terreur, messager de l’uppercut. Ça venait de loin, une enfance devant la télé à voir et revoir Le Gorille jusqu’à abattre les cloisons qui le séparaient de son héros dont il avait pris le souffle, la voix papier de verre, l’œil ouvert au noir et la goinfrerie légendaire ; il bouffait mimétique des pâtes aux kilos, comme s’il s’agissait de gaufres d’azymes messiées d’huile d’olive. Il était religieusement Lino, le rital en costard rayé du cinéma de papa. Vive la Fantaisie ! Mireille Darc toute nue ligotée, ça fait travailler la tête ! Car c’est ça la fantaisie, c’est le pays de l’imagination en cavale. Hier, je revoyais Ma nuit chez Maud de Rohmer. C’est le soir tard, la nuit donc, Françoise Fabien est au lit, couchée sous les couvertures et hop elle ôte son grand T-shirt marin qu’elle a passé avant de se glisser dans les draps. Boum, ça fantaisiste à fond. Trintignant encore dans les images de son rêve se jettera au réveil sur Françoise. Fauve. Mais janséniste, il se ravisera vite et furieux d’avoir succombé à sa fantaisie. N’oublions pas que nous sommes à Clermont-Ferrand dans la ville de Blaise Pascal. Et de son pari fameux comme furieux : « La Fantaisie est, ou elle n’est pas. » Mais de quel côté pencherons-nous ? La raison n’y peut rien déterminer : il y a un chaos infini qui nous sépare. Il se joue un jeu, à l’extrémité de cette distance infinie, où il arrivera croix ou pile. Que gagerez-vous ? Par raison, vous ne pouvez faire ni l’un ni l’autre ; par raison, vous ne pouvez défaire nul des deux. Ne blâmez donc pas de fausseté ceux qui ont pris un choix ; car vous n’en savez rien. » Oui, voici la Fantaisie, ce quelque chose dont on ne sait rien, qui court entre les images et sur quoi on est obligé de parier. Car le cinéma, ça existe !
Jacques Cauda |
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Commentaires :
pronostic .. par sabine moret
« coller à son personnage » m’interpelle ! et le pari « la fantaisie est, ou elle n’est pas » !! une idée, supprimer la virgule, ajouter un accent, et hop ! la fantaisie est où elle n’est pas !
ok, mais alors, où ? dans la raison du pari de « ceux qui ont pris un choix » ? dans le pari sans raison entre deux mots, l’embarras du choix ? dans le choix sans raison, au p’tit bonheur .. la chance ou le chaos ? cinéma de l’humeur du jour !! la vie est un théâtre ..
revenons à Blaise .. de Clermont-Ferrand à St-Etienne-du-Mont en passant par la Tour St Jacques, Blaise, mesurant, pariant, a opté ! pour coller à ce personnage, la raison du plus fort (la papauté) lui accordera-t-elle la Béatitude ? affaire à suivre !!
merci Jacques,