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13 mai 1958
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 Article publié le 19 mars 2017.

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Que nenni ! Un centre très spécial de l’Oregon va ouvrir ses portes pour former une bête, une machine à tuer sans pensée, sans remord, sans hésitation, de toutes les formes possibles et inimaginables. Impossible pour lui de supposer un seul instant que certains de ces instructeurs furent recrutés parmi les pires SS capturés à la fin de la guerre ! Ces peu recommandables personnages ont tous reconnu que le Franky Français avait d´excellentes prédispositions.

 Cet homme-là ne peut y perdre son âme, il n’en a jamais eue ! Huit mois d’enfer, de bourrage de crâne avant qu’on ne le renvoi sur un front asiatique. Pour y faire quoi ? Bof, du blé sur un compte de la Banque Barclay et du mal suffisent pour nourrir le loustic.

 Un boulot tout à fait particulier dans lequel le fait d’être Français va être particulièrement utile.

 Une minorité laotienne est brimée depuis la nuit des temps. Les Hmong vivent dans plusieurs pays différents dont la Chine, l’Indochine et s’ils ne forment que dix pour cent de la population du Laos, dans la plaine des Jarres ils sont en majorité. Ce peuple de montagnard refuse depuis la nuit des temps la soumission à toute autre ethnie. Les hommes luttent contre les troupes du Roi et fournissent également force combattants aux Viêt Kong. Beaucoup d’entre eux parlent avec plaisir la langue de Voltaire. Lors de l’invasion japonaise de cette partie de l’Asie, ils se sont battus farouchement mais maintenant, allez savoir pourquoi, ces messieurs du Pentagone les jugent dangereux...

 Les ressorts de la politique sont décidemment fort complexes et les vues des marchants d’armes relèvent simplement du machiavélisme ! Les intérêts de ceux qui programment la mort de milliers de personnes sont étrangement liés à ceux qui prétendent œuvrer pour leur bien vivre...

 

 

 

 Encore le13 mai 1958.

 Avec six derniers mois passés en salle d’opération, Marjolaine Teissier est fière de voir ses nom et prénom sur un beau diplôme d’infirmière spécialisée. D’autant plus contente qu’ayant obtenu les meilleurs notes de toutes les élèves de sa promotion, les cliniques les plus prestigieuses s’apprêtent à lui ouvrir bien grandes leurs portes. Après une plus mure réflexion, ce n’est pas le destin qu’elle va choisir. Sa cristallisation suivra des chemins de vie plus compliqués, très douloureux, où le feu et le sang sont rois.

 Et toujours ce même jour...En Algérie, le général Raoul Salan prend le pouvoir. De ces épousailles entre un militaire et une malheureuse terre sablonneuse du sud où l’inégalité est reine, va naitre une enfant terrible. L’Organisation de l’Armée Secrète. Paris tremble de voir apparaitre dans son ciel les bérets rouges des paras et ceux verts de la Légion Étrangère. Pour poser une cerise pourrie sur un gâteau déjà peu consommable, un mouvement insurrectionnel se lève également sur l’Île de Beauté. La Corse veut-elle forcer elle aussi pour que se déclenche un coup d’État militaire ?

 De Gaulle, s’il te plait, sauve-nous encore une fois !

 L’image du soldat est encore noble dans le cœur de Marjolaine. Ce sont des hommes en uniforme qui l’on libérée du camp maudit. Ce sont également des réguliers israéliens qui ont arrêté les massacres près de Hébron. Au grand désespoir de son nounours trop grincheux, la nouvelle infirmière propose ses services au personnel féminin auxiliaire de l’Armée Française. Cette noble institution qu’elle ne connait pas encore par son surnom de Grande Muette, devrait reprendre en main une république où il ne fait plus bon vivre. Tout le monde a le droit de se tromper. Peut-être faut-il aussi oublier que tous ses efforts pour retrouver François Berheim ont été vains…Comment diantre ce beau garçon si aimable, si raffiné, a-t-il pu s’engager dans la marine américaine ?

  Tout le monde parle maintenant des carnages de cette lointaine guerre hors de portée de la passion française et où il a du forcement combattre. Dans sa modeste chambrette, une non-croyante, plus d’une fois a imploré silencieusement la miséricorde du Dieu tout-puissant. Elle s’en va servir aujourd’hui sur un autre front, les sables du djébel l’appellent. Dans cette fournaise nord-africaine le sang abreuvera des sillons, tout aussi bien qu’en France ou en Indochine. Une terre ocre, sèche, dure à travailler et des milliers de dunes de sables que certains veulent garder françaises mais que les autochtones de toujours veulent algériennes, sans le drapeau tricolore. Qu’ils soient d’un bord comme de l’autre la couleur de la blessure est du même rouge. Et tu vas le savoir petite infirmière de la métropole !

 -Je veux bien partir, où vous jugerez bon de m’envoyer, mais il est hors de question que je monte dans un train ! C’est à prendre ou à laisser !

 Devant une telle détermination et une fois de plus grâce à l’intervention d’un abbé respecté par la France entière, c’est en avion militaire, décollage de Lyon Bron, que Marjolaine rejoint Marseille. A quai dans le port, le fleuron de la Compagnie de Navigation Mixte attend son lot de passagers. C’est le plus rapide, le plus confortable et le plus beau de tous ceux qui assurent la ligne avec l’Afrique du nord. Sur le Kairouan, deux énormes moteurs de conception ultramoderne n’ont jamais le temps de refroidir. On l’appelle le paquebot d’une nuit, référence au court moment qu’il met pour rallier Alger. Sa silhouette blanche aux superstructures vertes le rend reconnaissable entre tous. A bord, pas le temps d’avoir le mal de mer et Alger, elle aussi La Blanche, se révèle au petit matin tel un joyau dans le soleil levant.

 Affectée à l’hôpital militaire d’Oran, l’organisation de son transport méditerranéen aurait pu prévoir la traversée directe sur un autre bateau. Première fausse note d’une armée fière et parfaite. Il y en aura beaucoup d’autres. Tellement d’autres. Une véritable symphonie non fantastique. Dramatique, abominable partition où l’homme se transforme en un animal. Du même genre de ceux qu’elle a déjà connus sous les deux terribles initiales de SS !

 Pas question de monter dans le tortillard qui relie Alger à Oran en onze heures d’une épouvantable canicule pour seulement quatre cent trente kilomètres. Bien que la première classe soit proposée à cette infirmière décidément hors du commun, elle refuse le rail ! Peu importe le temps mais c’est seulement par la route ou par les airs que l’auxiliaire féminine accepte de se déplacer. Elle ne sait pas encore ce qu’est un hélicoptère ni que dans deux ans elle sera pratiquement capable d’en piloter un ! Une troisième solution est trouvée alors que la réputation de la petite de Lyon commence. Un patrouilleur côtier de la Royale (1) va la prendre à son bord. Six jours avec escales pour enfin découvrir Oran La Radieuse. En arabe, El-Bahia. Destination finale. Six jours de lent cabotage en surveillant des pêcheurs soupçonnés de passer des armes : Six longs jours dont une matinée entière de mal de mer par fort vent de noroit.

 Les présences féminines à bord ne sont pas fréquentes, probablement que des ordres très strictes ont été donnés sur son passage, mais à aucun moment Margo n’a ressenti sur elle des regards de mâles envieux, n’a écouté la moindre petite plaisanterie typique aux soldats fanfarons et souvent grossiers. Déjà une aura spécifique l’entoure et porte au respect. Elle ne s’en rend absolument pas compte.

 


1. Surnom donné à la Marine française

 

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