c’était noir
dans sa tête
tout en ombre sa pensée
nulle lumière
et pas de feu
et sa tête était prête
au pire
la nuit n’en finissait pas
il s’engourdissait
il n’y avait plus de cigarettes
plus d’alcool
la lune avait posé son immonde derrière
sur la cime des peupliers
de l’autre côté de la mer
et la mer évaporait des restes de soleil
après la terre
De la fenêtre il pouvait voir
l’arbre au pied duquel
il commettrait son forfait
ce matin peut-être
demain un jour
peut-être jamais peut-être jamais
en tout cas
l’idée était écrite
dans le noir de son cerveau
avec des mots choisis
une majuscule et un point final
Je la tuerai un jour.
Je la tuerai deux jours.
Je la tuerai trois jours.
Je la tuerai. Je la tuerai.
Je tuerai son cœur son cerveau
ses mains son sexe ses tripes
je les tuerai l’un après l’autre
ou tous ensembles
dans la formidable explosion
de ma haine
il faut que ça finisse
qu’elle s’arrête
que je m’arrête
Il le faut il le faut
j’ai un chien un chat
de l’amour plein le ventre
de la haine plein le cœur
à qui la faute
à qui le tour
il y a des algues dans mon cœur
des coquillages dans mon regard
le crabe à un drôle de derrière
et la mouette une voix douloureuse
c’est la mer qui revient
qui dépose son sel
dans les anfractuosités
ton mât est une branche
ton désir une feuille
l’écume est toute ta sève
il faut que ça finisse
il faut détruire ce qui n’est bon
ni pour le cœur
ni pour l’esprit
détruire ses frissons
ses tensions ses repos
sa gourmandise
détruire un rêve qui n’est plus le mien
le sommeil qui m’a quitté
détruire son cri de mouette gourmande
ses draps fantômes
ses liqueurs
ses vases
elle oubliera
et j’écrirai pour mieux détruire
elle oubliera que j’ai tué
j’en fixerai le moment
elle oubliera la douleur
il y a des mots pour le dire
la lune finissait
de liquéfier les peupliers
s’achevait avec eux
amoureusement
un premier rayon de soleil le fit frissonner
des feux s’estompaient dans le ciel
des nuages y rutilaient déjà
il fit dégouliner des gouttes de rosée
souffla dans les ailes d’un papillon
posa son oreille contre la ruche
le jour se levait