L’auteur peut rêver. Tout en oeuvrant pour la littérature, tout en étant l’un de ses plus exigeants serviteurs, il peut songer à loisir, fantasmer sans limite sur la définition de la muse.
Sur la possibilité d’une muse.
Tandis qu’il écrit, qu’il élabore des fictions au schéma narratif potentiellement novateur, il croise des subjectivités féminines, des corps de femmes tous plus différents les uns que les autres, à l’instar de leurs caractères respectifs. Ainsi, ce sont deux défilés qui se côtoient dans un parallélisme strict : celui des fictions, celui des dames.
Soudainement, la contingence arbore un nouveau visage, celui de la dissolution … au profit d’une incarnation brute, sauvage, animale, totale.
Eternelle.
L’auteur, en train d’écrire, voit se dresser, devant lui, cette silhouette unique, ce prototype féminin qu’il attendait sans attendre.
La vie est davantage matérielle, et l’écriture intègre cette nouvelle donnée, elle la recouvre, la traverse, la rend quintessente.
Ou plutôt, augmente sa quintessence.
L’écriture agit tel un scanner sur cette nouvelle créature.
Si le fantasme domine, s’il relègue la créature au rang de pure spéculation, c’est une vaste entité qui prendra sa place, une entité immense, sans limite, une entité dont le flux, dont la présence abstraite accompagnera l’auteur, tout le temps.
Serviteur d’une divinité invisible digne des temps païens, il avance, oui, il progresse, sans cesse, au sein d’un temple aussi grand que l’espace-temps.
Aussi vaste que la narration …